The Moon and Serpent Bumper Book of Magic

The Moon and Serpent Bumper Book of Magic

Dans la série Les livres que j’ai complètement zappé au moment de leur sortie sans trop savoir pourquoi, il y a ce fabuleux joyau d’Alan Moore et Steve Moore (no relation) que j’ai reçu le 4 mars 2025 (avec un peu de retard, donc) : The Moon and Serpent Bumper Book of Magic. Alors, c’est un Bumper Book pour adultes. Chez nous, un Bumper Book, on ne sait pas trop ce que c’est, mais en Angleterre, il y en a des tonnes et depuis longtemps. Un Bumper Book est un livre plutôt épais avec de petites BD documentaires ou historiques, des histoires illustrées et des activités censées permettre aux enfants de s’instruire en s’amusant, particulièrement par temps de pluie, quand la météo n’est pas propice à prendre l’air pour des activités saines et constructives bénéfiques à leur bon développement.

Alors évidemment, il existe aussi des parodies, et ce superbe livre d’Alan Moore se situe un peu entre les deux. Imaginez un manuel de philosophie axé sur la magie, écrit avec un humour anglais parfois complètement hilarant, et destiné aux enfants majeurs et avertis qui parviendraient quand même à manier le second degré malgré leur éducation parsemée d’activités saines et constructives bénéfiques à leur bon développement.

Passée la page complètement indispensable This book belongs to: (pour écrire votre nom), la jolie table des matières illustrée, le petit alphabet de la magie, et la courte BD en noir et blanc décrivant l’émergence de la pensée magique chez les premiers hommes, vous y trouverez pêle-mêle Old Moore’s Lives of the Great Enchanters, petites BD historiques d’une page décrivant la vie (et la mort) des magiciens qui ont influencé l’Histoire dessinées avec un décalage complètement délirant par Ben Wickey, une intro pleine d’humour et de modestie des deux Moore (sentiments qui empreignent littéralement tout le livre d’ailleurs), les articles Things to do on a rainy day (avec les jolis dessins de Rick Veitch) qui expliquent point par point ce qu’est la magie, comment la pratiquer et surtout les dangers à éviter, un peu comme on apprendrait à un scout à faire du feu (avec tous les petits problèmes logistiques et psychologiques que ça comporte), l’histoire originale The Dweller in the Abyss typique d’Alan Moore (et dessinée par John Coulthart), toute une partie sur la cabale et son rapport supposé avec le tarot, les épisodes d’une petite BD à suivre d’une page sur la vie (et la mort) d’Alexandre d’Abonuteichos (moi non plus, je ne le connaissais pas, mais il est important pour le livre) dessinée par Kevin O’Neill avec le même décalage hilarant que Ben Wickey, toute une partie sur le tarot et son rapport supposé avec la cabale (j’ai une sensation de déjà-vu, là) et toute une floppée d’informations sur la magie, dont les précautions à prendre lors de l’utilisation de psylocibine pour vos petits trips shamaniques par temps de pluie.

La fin du livre contient une synthèse de tous les thèmes abordés afin qu’ils soient bien appris et intégrés (surtout les thèmes abordés dans les BD d’une page, qui sont ici traités avec bien plus de sérieux, parce que les BD sont quand même vachement parodiques). Ça manque peut-être d’exercices et de quiz, mais bon, on a un puzzle et un jeu à points que je vous laisse découvrir. Les articles de fin ressemblent un peu à une ébauche de thèse, mais le tout dernier avant la post-face est hyper-intéressant, puisqu’il fait office de note d’intention, et décrit littéralement la création d’un mouvement magique public et ouvert à la critique. Alors pour moi, par définition, c’est un peu l’antithèse de l’ésotérisme, de l’occultisme et des sociétés secrètes. Public et ouvert à la critique. La magie au service de tous. Je vous laisse réfléchir au concept.

Et puis il y a les deux dernières pages, la post-face. Juste avant le temple à découper, à coller et à monter soi-même, les tables de correspondances dignes d’un ancien Livre d’or, la liste d’alphabets magiques, dont celui que vous pouvez créer vous-même, et la liste de figures géométriques (à lire dans l’ordre pour bien rigoler).

Juste avant tout ça. La post-face. Je ne m’y attendais pas, parce que je ne savais pas. Du coup, j’ai fait une recherche dans Google pour au moins avoir la date, puisque je ne la connaissais pas. Toujours est-il que ces deux dernières pages expliquent littéralement tout le livre.

Comme pour tous les textes d’Alan Moore, c’est un véritable plaisir de lire les écrits d’un philosophe à la fois égocentrique, généreux et modeste qui n’arrive pratiquement jamais à se prendre au sérieux, et se remet toujours en question. C’est simple, on n’arrive pas à garder son sérieux non plus en lisant certains traits d’humour (notamment les introductions de Things To Do On A Rainy Day). Si vous n’avez jamais lu un livre de philosophie déguisé en livre de magie en vous explosant de rire au détour d’un paragraphe, c’est l’occasion. Ce livre est exactement ce qui manquait au rayon ésotérisme de votre libraire préféré (celui qui ferme sa librairie pour boire un calva avec vous au restau d’à côté quand vous passez aux bonnes heures. En tout cas, moi, c’est ma notion d’un libraire sympa. J’en connais un d’ailleurs).

Alors les férus de magie n’apprendront rien au niveau technique, puisqu’ils savent déjà tout, c’est bien connu. En revanche, ils pourront bénéficier de presque 350 pages d’humour, de modestie, de générosité et surtout d’empathie, autant de traits de caractère qui feront certainement beaucoup de bien aux fans d’Aleister Crowley et autres magiciens célèbres.

Parce que l’empathie, pour un magicien, c’est quand même important.

Et c’est un hommage aussi.

Le 25 mars 2025, j’ai reçu la nouvelle édition d’Absolute Promethea Volume 1. C’était une coïncidence. Normalement, j’aurais dû découvrir The Moon and Serpent Bumper Book of Magic l’année dernière. J’ai lu Absolute Promethea immédiatement après (en réalité, j’ai relu ces douze premiers épisodes, parce que j’avais déjà acheté les comics à l’époque où ils paraissaient), et j’ai littéralement redécouvert Promethea. Si vous ne connaissez pas encore la série Promethea, je vous conseille vivement de lire The Moon and Serpent Bumper Book of Magic avant.

Bon allez, je vais passer à Ultimate Fantastic Four Omnibus (que j’ai reçu aussi récemment. Ça va être un plaisir de relire en grand format les premiers épisodes de cette série), et je vous laisse avec mes productions que vous ne trouverez pas chez le libraire d’à côté, même si vous me trouverez peut-être au restau du coin si je suis en train de boire un coup avec lui.

A propos Eric Peyron

Eric Peyron n'est un Expert en Rien. Après trois années de Fac dont deux redoublements, Peyron a commencé les petits boulots en intérim pour gagner un peu de blé. Heureusement, inconditionnel de comics en version originale (à cause de la censure et des traductions lamentables de la plupart des versions françaises de l'époque), Peyron est rapidement devenu traducteur d'anglais autodidacte pour des magazines informatiques des années 1990-2000, puis pour de nombreuses sociétés de traduction. Suite au refus par ces mêmes sociétés d'accepter une augmentation de ses tarifs en vingt ans de métier de traducteur, Peyron a fini par revenir à ses premiers boulots au SMIC, qui paradoxalement, vingt ans plus tard, rapportent plus que des traductions techniques… Actuellement, l'Expert en Tout fait donc de la mise en rayon, des inventaires et démonstrations en grande surface, monte et démonte des stands d'animation, donne des flyers aux passants dans la rue, distribue des prospectus dans vos boîtes aux lettres, et remplace des affiches dans les toilettes des bars et restaurants. De jour comme de nuit. Accessoirement, il est aussi auteur de BD en auto-édition, mais ça, vous le savez probablement déjà. Bref, Peyron est un type qui ne comprend absolument rien à rien, comme la plupart des imbéciles qui se baladent régulièrement sur les réseaux sociaux, mais ça va pas l'empêcher de donner son avis ! Ah oui, j'oubliais : "En tant que Partenaire Amazon, je réalise un bénéfice sur les achats remplissant les conditions requises" Je suis légalement obligé de le mentionner ici pour je ne sais quelle raison.

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