Likes

Quand Rage #6 sera sorti (l’année prochaine, donc), je vais artificiellement augmenter le nombre de Likes de mes deux pages de fans, tout d’abord en contactant en masse mes nombreux amis facebook (c’est plutôt simple, il suffit de cocher toute la liste), mais surtout en payant facebook pour la publicité de ma page. En fait j’ai déjà payé pour booster l’un de mes posts facebook il y a quelques années, et effectivement, ça fonctionne. Le truc, quand facebook vous demande de cocher des pays ciblés par le post, c’est de taper dans les pays comme la Thaïlande, les Philippines, la Corée du Sud, le Japon, la Chine, et quelques autres (en plus des pays que vous souhaitez vraiment cibler, naturellement). Ce sont des pays dont les citoyens à priori se foutent royalement des pages de fans d’un inconnu français, mais qui vont vous balancer des tonnes de Likes comme s’ils étaient payés pour ne faire que ça.

Si vous n’êtes pas déjà quelqu’un de connu, et que vous ne procédez pas de la sorte, vous n’allez pas créer un réel engouement pour vos opinions (oui, cette phrase a l’air un peu bizarre, mais en 2020, on crée réellement de l’engouement pour de simples opinions…). C’est même une espèce de cercle vicieux que tout le monde a vécu un jour : si une publication vous intéresse, mais qu’elle n’a aucun Like, vous allez vous demander si vous devriez être le premier à cliquer sur Like. Parce que s’il n’y a que vous, vous serez seul et exposé, et ce n’est pas un sentiment agréable. En revanche, si ce même post se retrouve avec une centaine de Likes en quelques secondes (si son posteur n’a payé que l’un des tarifs de base, donc), vous n’aurez aucun mal à cliquer vous aussi sur Like, avec le sentiment que votre avis sera soutenu par plein d’autres personnes et sera de toutes façons noyé dans la masse. Totalement safe, donc.

Le finalement participatif fonctionne d’ailleurs sur le même principe : il est fortement conseillé de ne jamais lancer une page sans qu’elle ait d’avance de nombreux participants. Ces participants, vous les trouverez dans ce qu’on appelle le premier cercle, celui de vos proches (vos amis et votre famille, qui sont censés soutenir vos projets farfelus). De cette façon, le participant lambda sera moins réticent à financer le projet pour exactement les mêmes raisons que celles citées plus haut.

Toutes ces nouvelles méthodes sont une évolution de ce qu’on appelait à mon époque le bouche-à-oreille. La technique, c’était de transmettre l’info sur votre projet à des personnes influentes, qui boostaient littéralement cette info grâce à leurs contacts, et la transformaient ainsi en quelque chose de fashionable. Et quand c’est bien fait, dans le milieu artistique, ça marche à tout les coups, et avec littéralement n’importe quoi. Les premiers clients ont subitement l’impression de découvrir quelque chose qui était là depuis longtemps, mais qui leur avait échappé (alors que l’info ne date souvent que de quelques jours), et consomment immédiatement, avec la certitude qu’ils seront quand même parmi les premiers à profiter du produit. Quant à la masse de clients mainstream, la cible réellement visée, moins difficiles que les premiers clients, mais beaucoup plus nombreux, ils consommeront dans la foulée pour produire le plus gros du revenu.

En fréquentant les divers exposants de festivals de BD, j’ai d’ailleurs pu recueillir le témoignage d’un auto-éditeur dont les personnages étaient dessinés par des fans. Le principe, c’est que si vos personnages ont du succès, des fans vous envoient leurs dessins, que vous postez ensuite sur votre mur facebook. Après, dessiner, c’est bien joli, mais les dessinateurs préfèrent être payés pour travailler. Et c’est ce que faisait cet auto-éditeur. Il payait pour avoir des dessins de fans qui n’en étaient pas nécessairement, et ça marchait relativement bien. L’illusion y était, en tout cas.

Et après tout, pourquoi pas ? Comme je l’écrivais dans l’un de mes articles précédents, faire de la promotion, ce n’est pas prendre les gens pour des cons, c’est reconnaître qu’ils le sont vraiment, et agir en conséquence…

About Eric Peyron

Eric Peyron n'est un Expert en Rien. Après trois années de Fac dont deux redoublements, Peyron a commencé les petits boulots en intérim pour gagner un peu de blé. Heureusement, inconditionnel de comics en version originale (à cause de la censure et des traductions lamentables de la plupart des versions françaises de l'époque), Peyron est rapidement devenu traducteur d'anglais autodidacte pour des magazines informatiques des années 1990-2000, puis pour de nombreuses sociétés de traduction. Suite au refus par ces mêmes sociétés d'accepter une augmentation de ses tarifs en vingt ans, Peyron a fini par revenir à ses premiers boulots au SMIC, qui paradoxalement, vingt ans plus tard, rapportent plus que des traductions techniques… Actuellement, l'Expert en Tout fait donc de la mise en rayon, des inventaires et démonstrations en grande surface, monte et démonte des stands d'animation, donne des flyers aux passants dans la rue, distribue des prospectus dans vos boîtes aux lettres, et remplace des affiches dans les toilettes des bars et restaurants. De jour comme de nuit. Accessoirement, il est aussi auteur de BD en auto-édition, mais ça, vous le savez probablement déjà. Bref, Peyron est un type qui ne comprend absolument rien à rien, comme la plupart des imbéciles qui se baladent régulièrement sur les réseaux sociaux, mais ça va pas l'empêcher de donner son avis !

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