Les droits d’auteur, Part One

Et si on consacrait une petite série d’articles aux auteurs et à l’augmentation du coût de la vie ? Il s’agit d’un sujet qui avait l’air assez stressant en janvier 2020, pendant le festival d’Angoulême. Tout ce qui stresse est susceptible d’énerver, et tout ce qui énerve est récupéré par les propagandistes qui ont tendance à nous faire un peu tout mélanger (on l’a vu récemment avec tout ce battage sur la réouverture des librairies), alors autant y consacrer une section… Allez on commence avec les droits d’auteur.

Les droits d’auteur

Succinctement, quand une BD est acceptée par un éditeur, vous avez deux types de situation : soit l’auteur conserve ses droits, soit il les cède à l’éditeur. Si l’auteur conserve ses droits, l’éditeur va lui reverser pour la vente de chaque livre un pourcentage de droits d’auteur correspondant à ce qu’il reste après déduction de tous ses frais (et de son pourcentage à lui).

Si l’auteur travaille pour un éditeur aux épaules solides, pendant la création de son album de BD, il recevra un à-valoir, une avance sur ses droits d’auteur qui lui permettra d’avoir de l’argent pendant qu’il travaille sur son album. Une fois l’album terminé, cet à-valoir sera déduit des premières ventes jusqu’à son remboursement. Ce n’est qu’après ce remboursement progressif (prenant également en compte la provision sur retour, dont je parlerai probablement dans un futur article) que l’éditeur sera en mesure de verser son pourcentage à l’auteur. Notez que si le volume de ventes n’est pas suffisant pour le remboursement de l’à-valoir, l’auteur ne sera pas tenu de le rembourser avec ses fonds propres. C’est déjà ça de gagné. Notez aussi que pendant le remboursement de l’à-valoir, la BD ne fait aucun bénéfice, donc, normalement, l’éditeur ne devrait pas en faire non plus.

En cas de succès, tout le monde y gagne. En cas d’échec, en revanche, la seule chose que peut gagner un auteur, c’est sa possibilité de garder l’à-valoir (ou de déposer plainte si l’éditeur essaie de l’obliger à le rembourser avec ses fonds propres…) Notez également qu’en cas de succès, vous pouvez renégocier vos droits d’auteur. Un éditeur avisé aura donc prévu d’augmenter lui-même le pourcentage de droits d’auteur par paliers en fonction du volume de ventes, sa seule autre option étant de voir son auteur à succès se casser pour aller travailler chez le concurrent, et être obligé de négocier des pourcentages beaucoup trop élevés pour essayer de le garder.

Si l’auteur cède ses droits à l’éditeur, la méthode de paiement change. L’auteur prend alors le rôle de prestataire de service, et on le paie à la planche ou en royalties. Où les deux, ce qui est nettement préférable. Dans ce cas, pas d’à-valoir. Juste une ou plusieurs avances sur le paiement des planches pour que l’auteur puisse commencer à travailler en étant payé, et le reste à la fin de l’album. Pas de remboursement de quoi que ce soit par l’auteur, et dès la première vente, les royalties sont dues.

Dans ce deuxième cas, si la BD a du succès, l’éditeur est le principal gagnant. En cas d’adaptation cinéma, par exemple, seul l’éditeur en retirera les bénéfices, à moins d’un nouveau contrat avec l’auteur. En cas d’échec, seul l’auteur y gagne. Il a été mandaté pour un travail, et il a été payé. Et naturellement, l’éditeur y perd, parce qu’il a payé chaque planche, et que son investissement ne lui a pas rapporté grand chose.

La méthode française, c’est la première méthode…

Dans le prochain article sur ce sujet… on va aborder l’inflation, un terme dont vous allez entendre parler de plus en plus souvent. L’inflation, c’est un problème économique complexe qui implique de faire la différence entre quantité et valeur, mais pas d’inquiétude, comme vous le savez probablement déjà, je suis un expert Facebook, et les experts Facebook savent tout, donc je m’y connais même en économie si j’ai envie. Rendez-vous donc dans un prochain article pour découvrir comment tout ce joli système de rémunération peut dégringoler.

A propos Eric Peyron

Eric Peyron n'est un Expert en Rien. Après trois années de Fac dont deux redoublements, Peyron a commencé les petits boulots en intérim pour gagner un peu de blé. Heureusement, inconditionnel de comics en version originale (à cause de la censure et des traductions lamentables de la plupart des versions françaises de l'époque), Peyron est rapidement devenu traducteur d'anglais autodidacte pour des magazines informatiques des années 1990-2000, puis pour de nombreuses sociétés de traduction. Suite au refus par ces mêmes sociétés d'accepter une augmentation de ses tarifs en vingt ans, Peyron a fini par revenir à ses premiers boulots au SMIC, qui paradoxalement, vingt ans plus tard, rapportent plus que des traductions techniques… Actuellement, l'Expert en Tout fait donc de la mise en rayon, des inventaires et démonstrations en grande surface, monte et démonte des stands d'animation, donne des flyers aux passants dans la rue, distribue des prospectus dans vos boîtes aux lettres, et remplace des affiches dans les toilettes des bars et restaurants. De jour comme de nuit. Accessoirement, il est aussi auteur de BD en auto-édition, mais ça, vous le savez probablement déjà. Bref, Peyron est un type qui ne comprend absolument rien à rien, comme la plupart des imbéciles qui se baladent régulièrement sur les réseaux sociaux, mais ça va pas l'empêcher de donner son avis !

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