Alors, l’autre jour j’ai posté le truc suivant sur Facebook :
« Vous travaillez avec Amazon donc restez chez Amazon »
« Demandez donc à Amazon ( qui souhaite la mort des éditeurs et des libraires , qui ne paye pas d impôt ) d organiser un festival pour vous inviter . »
Quand j’envoie une demande à un festival de BD pour une participation, j’écris dans cet email que mes BD sont dispos dans de nombreuses bibliothèques numériques et en version imprimée sur Amazon. Généralement, tout le monde le prend plutôt bien, même si les libraires ne sont pas forcément tous super-contents, mais il y a quelques exceptions…
Hé ben, j’ai été gentil. J’aurai pu poster aussi d’autres parties de ma discussion avec un (ou une) libraire qui ne voulait absolument pas que je participe à son festival, notamment à cause du mot Amazon dans mon email. Par exemple son C est vrai que les libraires gagnent des fortunes et que le pauvre Jeff Bezos a du mal à s en sortir . qui sous-entend que je fais imprimer mes livres sur Amazon par soutien pour Jeff Bezos (et ça implique aussi que j’ai encore affaire à un gilet jaune à 4000 euros par mois… Faudrait quand même expliquer à ces gens là que ne plus pouvoir partir en vacances au ski à Courchevel, c’est pas un si gros sacrifice. Il y a pire.) Et son Ici nous ne travaillons qu’ avec les librairies indépendantes, ça voulait dire quoi ? En rapport avec Amazon, c’est quoi exactement, une librairie dépendante ? Je n’en ai toujours aucune idée.
En revanche, j’ai bien aimé son Les libraires ne servent à rien donc pourquoi les rémunérer ? surtout pour la suite Si vous ne trouvez d éditeurs ce n est pas le problème des libraires parce qu’on pourrait inverser complètement les rôles en changeant quelques mots : Les éditeurs dont les livres ne sont pas en librairie ne servent à rien donc pourquoi les inviter ? Si tous vos clients se cassent chez Amazon, ce n est pas le problème des petits éditeurs.
Bref, on pourrait lui renvoyer sa réponse, qui se traduit en gros par Je suis une victime et vous pouvez crever, avec exactement les mêmes arguments…
Je n’ai pas osé demander à ce porte-flambeau de la culture quelle était son opinion sur Poutine et Le Pen, d’autant plus que ce n’était pas le sujet, mais je crois que j’en ai une petite idée, et tant qu’à en faire un sujet d’article, autant vous parler des festivals de BD.
Alors, un festival, ça ne se finance pas tout seul.
Pour ça, il faut des aides.
Les aides, on les demande principalement à la mairie et au Conseil général, et ce n’est pas évident de les obtenir, sauf si on a une thématique qui s’accorde avec celle des élus, à savoir la région, son histoire, ses spécialités, son rôle majeur dans la résistance en 40, les légendes du cru, et tout un tas d’autres attractions touristiques locales qui vont attirer bien plus de monde que les simples fans de BD. Autant dire qu’il vaut mieux tomber sur des responsables qui sont aussi de véritables fans de BD, et ça tombe bien, parce qu’il y en a de plus en plus.
Une fois l’accord obtenu, les organisateurs, souvent des associations, sont bien soulagés. Reste à inviter les auteurs, et pour ça, on fait appel au libraire qui s’y connait bien. Et c’est vrai qu’il s’y connait bien, le libraire, parce qu’un auteur, il sait ce que c’est : c’est quelqu’un dont le livre est en vente dans sa librairie. Ça veut dire qu’il peut s’agir d’une vedette évidemment, mais aussi d’un inconnu qui va rapporter un peu moins, mais que le libraire va inviter quand même comme s’il avait des quotas.
Et qui n’a généralement aucune chance de faire partie des quotas ? Tous les éditeurs dont les livres ne sont pas en vente dans la librairie. C’est pour ça que je ne fais pas beaucoup de festivals. Parfois, le seul moyen d’entrer, c’est de donner un pourcentage sur mes livres au libraire-en-chef, mais le plus souvent, je ne suis juste pas invité parce que la priorité est donnée aux auteurs dont les livres sont dispos en librairie. Et une fois qu’on en a fini avec la priorité, il n’y a plus de place.
Et c’est vrai que donner un pourcentage au libraire, ça paraît normal dans certaines situations (si on est invité sur le stand qu’il a payé, par exemple), mais pas s’il est lui-même organisateur, et qu’il utilise l’argent de la commune ou de la région pour organiser son festival, même s’il crève la faim parce qu’il n’arrive plus à payer les mensualités pour la construction de la piscine de sa maison de campagne. On veut bien se culpabiliser, mais dans certaines limites quand même, et ne pas être aussi riche que Jeff Bezos, ce n’est pas une excuse pour contribuer à écraser les plus faibles.
Allez, je vous laisse avec une galerie de tout plein de trucs qui ne sont pas dispos en librairie.