La culture, c’est sur Amazon

Oubliez ces posts à la con que vous voyez passer sur Facebook, la culture c’est sur Amazon. Voilà, c’est dit, et je trouve que c’est une belle façon de lancer mon blog.

Et je peux même vous expliquer pourquoi en une phrase : c’est parce que contrairement aux librairies, TOUS les éditeurs sont représentés sur Amazon. TOUS LES ÉDITEURS. Même les indépendants. Même moi. Et ce n’est pas rien. Ce n’est pas quelque chose d’anodin, et ce n’est certainement pas scandaleux. La diversité culturelle, vous ne la trouverez pas en librairie. Lorsque vous allez en librairie, vous n’y trouvez que les livres qui font partie de la chaîne du livre, pas TOUS les livres. À la limite, votre libraire pourra vous commander un livre qu’il n’a pas, mais ça dépend lequel. Et pourquoi aller chez un libraire pour commander un livre ?

Donc, si vous aimez lire, et si vous voulez faire vos emplettes dans de bonnes conditions (le service de retours est impeccable), achetez sur Amazon.

À l’heure où j’écris ces lignes, on est en plein confinement, et tous les magasins sont fermés. Tous les magasins y compris les librairies. Alors tout le monde a commencé à partager des posts que je trouve littéralement scandaleux. Les posts et dessins incitant à rouvrir les librairies pour sauver le Livre et la culture en général sont les pires, parce que ce sont les plus hypocrites. Non fermer les librairies ne va pas nous empêcher d’acheter des livres. Fermer le rayon Librairie des FNAC non plus d’ailleurs.

Après, même si je peux me donner mon opinion sur quelques posts Facebook, je ne peux pas trop me mettre en porte-à-faux avec mes amis auteurs et libraires. Heureusement, un blog, ça sert à ça.

En cette période de confinement national, les librairies sont donc fermées, et comme tous les commerces, l’État va leur attribuer une aide à hauteur de 10 000 euros basée sur l’évaluation de leur chiffre d’affaire mensuel. Naturellement, il vaudrait mieux que cette évaluation soit basée sur une moyenne des chiffres d’affaire des mois de novembre précédents, le mois de novembre étant l’un des mois les plus importants pour le commerce, mais cette question est un peu éludée par les râleurs. Au début de la grogne, ce qui dérangeait les libraires, c’était uniquement de fermer. Et puis, ils ont remarqué que la FNAC n’avait pas fermé, parce que la FNAC vend également des produits informatiques, considérés comme produits de première nécessité, alors qu’une librairie comme Cultura est obligée de fermer parce que ses produits ne sont pas de première nécessité. Et là, ils ont voulu faire fermer la FNAC…

On reprend pour bien comprendre : les petites librairies auront une aide à hauteur de 10 000 euros par mois de confinement. Les grandes chaînes de librairies sont obligées de fermer tandis que la FNAC et les grandes surfaces conservent l’autorisation d’ouvrir, donc de vendre des livres, donc de pratiquer une forme de concurrence déloyale aux grandes chaînes de librairies, tandis que les petites librairies remplissent les dossiers pour être payées à rien foutre en attendant que ça passe. Vous n’avez pas l’impression que le problème se situe entre les grandes chaînes de librairies et les grandes surfaces, et que les chaînes de librairies mettent en avant les petites librairies indépendantes pour justifier leurs revendications ? Parce que moi si. Mais c’est peut-être un problème que j’ai, parce que mettre en avant les petites gens pour justifier les demandes des gens aisés, je vois ça littéralement partout depuis quelques années.

Résultat des courses : le gouvernement a tranché et décidé la fermeture des rayons Librairie de la FNAC. Alors ça va être peut-être compliqué à comprendre, mais au niveau sanitaire, réduire un espace fermé, ce n’est pas recommandé. Et obliger la FNAC à fermer ses rayons Librairie, sur le principe, c’est vraiment complètement con. Les librairies déjà fermées ne vont pas en bénéficier, et ça va augmenter les ventes d’Amazon… Aller acheter vos livres à la FNAC, dans une grande librairie comme Cultura ou dans une grande surface, c’est déjà pénalisant pour votre sympathique libraire de proximité. Si en plus les clients s’habituent à commander chez Amazon, ça va être encore pire. Et je sais de quoi je parle, je suis devenu client Amazon au début des années 2000, j’ai été le premier surpris par l’honnêteté de leur service de retours à une époque où les commerçants étaient surtout connus pour leur mesquinerie, et depuis, je ne peux plus m’en passer.

Naturellement, cette décision a créé une brèche juridique dans laquelle se sont gaiement engouffrés les magasins de jouets. Parce qu’eux aussi, ils ont des problèmes. Pas de raison que les grandes chaînes de magasins soient obligées de fermer alors que les grandes surfaces continuent de vendre des jouets. C’est pas juste pour les petits magasins de jouets indépendants, alors faut que les grandes surfaces ferment leurs rayons Jouets. Donc, je m’attends à ce que les grandes surfaces ferment leurs rayons Librairie et Jouets à moins de deux mois de Noël…

Quand ce sera terminé, si vous voulez toujours boycotter les sites de vente par correspondance comme Amazon, il ne vous restera plus qu’à attendre la fin du confinement pour vous ruer en masse dans les magasins et les grandes surfaces et acheter enfin vos livres et vos jouets. Et n’oubliez pas la distance de sécurité, hein ?

About Eric Peyron

Eric Peyron n'est un Expert en Rien. Après trois années de Fac dont deux redoublements, Peyron a commencé les petits boulots en intérim pour gagner un peu de blé. Heureusement, inconditionnel de comics en version originale (à cause de la censure et des traductions lamentables de la plupart des versions françaises de l'époque), Peyron est rapidement devenu traducteur d'anglais autodidacte pour des magazines informatiques des années 1990-2000, puis pour de nombreuses sociétés de traduction. Suite au refus par ces mêmes sociétés d'accepter une augmentation de ses tarifs en vingt ans, Peyron a fini par revenir à ses premiers boulots au SMIC, qui paradoxalement, vingt ans plus tard, rapportent plus que des traductions techniques… Actuellement, l'Expert en Tout fait donc de la mise en rayon, des inventaires et démonstrations en grande surface, monte et démonte des stands d'animation, donne des flyers aux passants dans la rue, distribue des prospectus dans vos boîtes aux lettres, et remplace des affiches dans les toilettes des bars et restaurants. De jour comme de nuit. Accessoirement, il est aussi auteur de BD en auto-édition, mais ça, vous le savez probablement déjà. Bref, Peyron est un type qui ne comprend absolument rien à rien, comme la plupart des imbéciles qui se baladent régulièrement sur les réseaux sociaux, mais ça va pas l'empêcher de donner son avis !

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