AI, informatique et métiers

La Nouvelle Année approche, et j’ai une nouvelle image Rage du Nouvel An de Stéphane Degardin que je vais publier demain sur le Rage Website !

Mais, ici on n’est pas sur le Rage Website, donc pas de Joyeux Noël, et pas de Bonne Année (connectez-vous demain sur le Rage Website pour mes meilleurs voeux). Non, ici on est toujours en pleine dystopie.

Grâce aux progrès fulgurants de l’AI, on s’est retrouvé projetés tête la première dans un nouveau monde du jour au lendemain, on n’était pas prêt, et je suis personnellement plutôt content de vivre les prémices d’une transformation à laquelle je ne pensais pas assister de mon vivant.

Evidemment, je ne suis pas concerné par une perte d’emploi éventuelle, parce qu’en ce qui me concerne, c’est fait depuis longtemps : j’étais traducteur d’anglais pour des sociétés de traduction. Elles ont fait évoluer leur système de mémoire de traduction en système de traduction automatique, et nous ont transformés en simples correcteurs, même s’il restait quand même quelques rares projets de traduction pure. Et là, bizarrement, ce n’est pas le logiciel qui m’a gonflé, ce sont les gens. Un correcteur travaillant sur un fichier pré-traduit, c’est normal qu’il soit moins bien payé. Quant aux augmentations de tarifs, elles étaient systématiquement refusées. Quand mes revenus ont commencé à s’approcher du SMIC, j’ai arrêté et j’ai cherché des petits boulots intérimaires salariés. Comme l’a si bien dit le président un jour de délire, j’ai traversé la rue, et dans la rue d’en face, il y avait effectivement du boulot. Tous les boulots dont les gens normaux ne voulaient pas. Bref, je suis peut-être le cauchemar que vous allez vivre dans quelques années si vous n’avez pas de chance. Bienvenue au Pays des Merveilles.

Concernant, mon activité de scénariste, une AI ne va pas me faire perdre un métier que je n’ai jamais eu : je suis en auto-édition, j’écris pour le plaisir, et je ne vais pas arrêter parce qu’une AI peut imiter ce que je fais. En quatorze ans d’auto-édition, j’ai eu largement le temps de comprendre qu’aucun éditeur ne va me donner du boulot, et c’est pas la faute aux AI. En France, pour les scénarios, le niveau est bas, donc si vous savez aligner quelques mots, faire une jolie rédaction et que vous vous trouvez un copain dessinateur, vous deviendrez scénariste, mais n’essayez pas d’envoyer juste un scénario, ça ne marchera pas. Parce que des scénaristes, il y en a trop. C’est un fait, les éditeurs ne sont pas demandeurs, sauf pour leurs éventuels projets bankables pour lesquels ils ont besoin de scénaristes bankables (donc des scénaristes déjà édités depuis longtemps). Perso, j’ai même arrêté de faire des demandes depuis plus de dix ans.

Et maintenant avec l’avènement de l’AI que va-t-il arriver aux pauvres artistes ? Ben comme dans tous les cas similaires, le processus est le même. Ce qui attend les artistes est déjà arrivé aux lettreurs, aux coloristes, aux traducteurs, aux disquaires et j’en passe.

La technologie est inédite, les lois et la jurisprudence sont encore à créer, mais la situation n’est pas nouvelle, et tiens, pour en décrire l’évolution, j’ai même trouvé un exemple sympa.

Ce que les artistes vivent actuellement, les gens de ma génération y ont assisté quand c’est arrivé au monde de la musique : avec l’arrivée du numérique, plein de gens qui achetaient des CD se sont mis à télécharger de la musique illégalement, voire à copier leurs CD sur leurs disques durs puis à vendre les CD en gardant les copies (ce qui est tout aussi illégal). Au lieu de proposer une solution numérique payante qui aurait été largement moins rentable que la vente de CD, les producteurs et les groupes de musique se sont mis à crier au vol tout en refusant toute alternative et en faisant barrière à la vente numérique. Tant qu’on restait dans cette situation, malgré tout ce qu’on prétendait, il y avait peu de gens qui perdaient leur boulot.

Et un jour, Apple a créé l’iTunes Store et a lancé la vente de musique numérique. Tout le monde s’est mis à acheter de la musique numérique, et là, les disquaires ont commencé à fermer, et de nombreux autres membres de la chaîne de production ont commencé à licencier. Ce que vous considérez comme du vol va un jour être réglementé et devenir légal sous une forme ou une autre, mais c’est à ce moment là que ça deviendra problématique pour les artistes. L’AI ne vous fera pas perdre votre boulot tant que tout le monde la considèrera comme illégale, c’est l’inverse. Vous perdrez votre boulot quand tout deviendra indéniablement légal. Et ça a déjà commencé.

La suite dans quelques jours (ou peut-être même demain, si j’ai le temps). Ça m’inspire, les AI.

Allez, je vous laisse avec une galerie de bouquins 100% artisanaux, même si on utilise quand même pas mal d’informatique pour les couleurs, le lettrage, les maquettes, et heu… 

Allez, je vous laisse avec une galerie de bouquins artisanaux à 50%.

A propos Eric Peyron

Eric Peyron n'est un Expert en Rien. Après trois années de Fac dont deux redoublements, Peyron a commencé les petits boulots en intérim pour gagner un peu de blé. Heureusement, inconditionnel de comics en version originale (à cause de la censure et des traductions lamentables de la plupart des versions françaises de l'époque), Peyron est rapidement devenu traducteur d'anglais autodidacte pour des magazines informatiques des années 1990-2000, puis pour de nombreuses sociétés de traduction. Suite au refus par ces mêmes sociétés d'accepter une augmentation de ses tarifs en vingt ans, Peyron a fini par revenir à ses premiers boulots au SMIC, qui paradoxalement, vingt ans plus tard, rapportent plus que des traductions techniques… Actuellement, l'Expert en Tout fait donc de la mise en rayon, des inventaires et démonstrations en grande surface, monte et démonte des stands d'animation, donne des flyers aux passants dans la rue, distribue des prospectus dans vos boîtes aux lettres, et remplace des affiches dans les toilettes des bars et restaurants. De jour comme de nuit. Accessoirement, il est aussi auteur de BD en auto-édition, mais ça, vous le savez probablement déjà. Bref, Peyron est un type qui ne comprend absolument rien à rien, comme la plupart des imbéciles qui se baladent régulièrement sur les réseaux sociaux, mais ça va pas l'empêcher de donner son avis !

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